Venezuela : les États-Unis en véritables voyous dans les Caraïbes

International Tribunes

Les États-Unis veulent-ils renverser le régime du Venezuela sous couvert de la lutte contre le narcotrafic dans les Caraïbes ? Après avoir ordonné des frappes contre des bateaux qu’il présente comme appartenant à des trafiquants de drogue, Donald Trump a reconnu avoir autorisé la CIA à mener des opérations clandestines sur le territoire vénézuélien. Ces velléités, contraires au droit international, interrogent sur les motivations réelles de Washington.

Les États-Unis ont déployé, ces dernières semaines, sept navires de guerre dans les Caraïbes et un dans le Golfe du Mexique, dans le cadre de ce que la Maison Blanche présente comme des opérations de lutte contre le trafic de stupéfiants. Ces opérations visent particulièrement le Venezuela et son président Nicolas Maduro, accusé d’être le parrain de la drogue qui ravage la jeunesse américaine. À ce jour, l’armée américaine a mené 15 frappes contre des bateaux prétendument liés au narcotrafic, faisant au total 62 morts. Si le Pentagone assure stopper le flux de cocaïne par ces attaques, les débris montrent parfois qu’il s’agit de simples pêcheurs.

La lutte contre le trafic de drogue, un prétexte « pour imposer un changement de régime »

Donald Trump, qui a reconnu avoir autorisé des opérations clandestines de la CIA sur le territoire vénézuélien, a aussi évoqué de potentielles frappes terrestres pour détruire des camps de trafic. Pour Nicolas Maduro, Washington veut se servir de la lutte contre le trafic de drogue « pour imposer un changement de régime » et s’emparer du pétrole vénézuélien.

Une accusation crédible quand on connaît l’histoire de l’armée américaine, qui a déjà eu recours à des prétextes farfelus pour attaquer des régimes gênants (qui gênent leurs intérêts). Ce point sera évoqué plus tard. Il faut d’abord s’attarder sur la légalité de cette campagne militaire. Il n’y a pas eu de déclaration officielle de guerre ni de vote au Congrès pour mener une quelconque guerre contre le pouvoir vénézuélien. Ce qui classe l’administration Trump parmi les États voyous.

Le Venezuela bientôt victime des mensonges de Washington comme avec l’Irak ?

Si Caracas est une dictature, aucune loi n’autorise les États-Unis à intervenir pour changer de régime et installer un autre qui serait favorable à Washington. Pour revenir au fameux prétexte menant à la guerre contre des régimes hostiles, on se souvient encore du grossier mensonge inventé par l’administration Bush pour s’attaquer à l’Irak de Saddam Hussein. Les États-Unis ont accusé Bagdad de préparer des armes chimiques pour attaquer l’Amérique.

En février 2003, Colin Powell, alors secrétaire d’État américain, a brandi sans honte une fiole lors d’une réunion du Conseil de sécurité de l’ONU pour tenter de prouver que l’Irak possédait des armes de destruction massive et justifier une invasion. Cette accusation a été contestée plus tard et s’est révélée largement inexacte. Certains de ses auteurs ont même reconnu avoir fait du faux. À présent, le même schéma se profile à l’horizon avec le Venezuela. Cette fois ce ne sont pas les prétendues armes chimiques, ni les missiles que Caracas développe avec l’aide de Téhéran, mais la drogue…

Il suffit de coopérer avec le Venezuela pour combattre le narcotrafic

Cet argument paraît tellement ridicule qu’on a envie d’en rire. Pour lutter contre le narcotrafic, il suffit de coopérer avec l’armée vénézuélienne. Pas besoin de menacer Caracas, traité de narco-régime. D’ailleurs , si Washington veut vraiment lutter contre le trafic de drogue, c’est par la Colombie qu’il fallait commencer. C’est le cœur du trafic. Mais Bogota est un pouvoir moins hostile aux États-Unis, quoique son président ait récemment critiqué Donald Trump.

Tout le monde est d’accord pour dire que le régime vénézuélien est une dictature. Mais, s’il faut se débarrasser de la sorte de toutes les autocraties du monde, l’armée américaine aura beaucoup à faire car il y en a des dizaines à travers le monde. Et puis, il ne faudra pas trier les dictatures selon leur proximité avec Washington. Quand on se fait justicier, il faut le faire entièrement, et pas selon ses intérêts. Les USA devraient commencer par leurs alliés du Golfe ou d’Afrique pour montrer l’exemple…

Les États-Unis veulent maintenir le régime chaviste corrompu, mais avec un dirigeant plus docile 

Mais on le sait, ce n’est pas au nom de la démocratie et des libertés que l’Amérique agit. Elle cible uniquement les dictatures hostiles, nationalistes ou alignées sur l’est. Au Venezuela, c’est clair que les États-Unis cherchent davantage à installer un régime aux ordres pour s’emparer du pétrole comme il l’a fait en Irak et dans une moindre mesure en Libye. On sait d’ailleurs, par la presse américaine, que la Maison Blanche prépare depuis longtemps l’agression du Venezuela.

Selon le New York Times et le Miami Herald, des discussions ont été entamées en avril dernier avec des intermédiaires qataris afin d’écarter Maduro du pouvoir sans démanteler les structures chavistes. Autrement dit, les Américains veulent maintenir un régime corrompu, mais allié, pour pomper sans vergogne les richesses du Venezuela. Ils auraient même déjà trouvé leur dirigeante fantoche, la vice-présidente Delcy Rodríguez , qui nie toutefois tout contact avec Washington.