Pour des raisons sécuritaires, le Mali a fermé sa frontière avec la Mauritanie. Cette décision suscite de l’inquiétude chez les éleveurs nomades mauritaniens. Ceux-ci ne peuvent plus conduire leur bétail de l’autre côté de la frontière où l’herbe est plus verte en cette période de l’année. Ils appellent leurs autorités à trouver rapidement des solutions.
Le Mali a récemment fermé sa frontière avec la Mauritanie, longue de 2 237 kilomètres, pour des raisons sécuritaires, en lien avec la lutte contre le terrorisme. Bamako fait actuellement face à une recrudescence des attaques djihadistes qui perturbent l’approvisionnement en carburant, l’obligeant à suspendre les cours dans les écoles et universités jusqu’au 9 novembre.
La fermeture des frontières, un coup dur pour les éleveurs
Cette fermeture des frontières entre le Mali et la Mauritanie pose un gros problème aux éleveurs nomades mauritaniens car près de 70% des 30 millions de têtes qui constituent le cheptel mauritanien s’alimentent dans les pâturages du Mali à cette période de l’année, car l’herbe y est plus verte. Ainsi, les régions de l’est et du sud-est (Hodh el Gharbi, Hodh el Charki, l’Assaba et Guidimakha) sont désormais confrontées à une crise, alors que le secteur de l’élevage demeure l’un des piliers de l’économie nationale. En effet, cette activité représente environ 10% du PIB, 70% de la valeur ajoutée du monde rural et emploie 10% de la population active.
Ce n’est pas qu’une question économique, mais également culturelle
Le Groupement National des Associations Pastorales tire la sonnette d’alarme. L’association note que l’arrêt de la transhumance vers le Mali aura de graves conséquence pour les éleveurs. Certains seront contraints de vendre une partie de leur troupeau à perte (ovins, caprins et bovins), faute d’alternative pour les nourrir. Du côté des commerçants, on évoque des difficultés d’approvisionnement et une chute des prix. Par ailleurs, ce n’est pas qu’une question économique. Dans les zones frontalières, la transhumance constitue aussi un mode de vie structuré autour de réseaux familiaux et tribaux. La fermeture des frontières déstabilisera donc un équilibre ancestral entre les communautés des deux pays.
Les conflits entre agriculteurs et éleveurs pourraient se raviver
Des experts locaux avertissent que l’arrêt de la transhumance entre le Mali et le Mauritanie pourrait provoquer des tensions sociales à moyen terme. En effet, le manque de ressources, la concurrence pour les pâturages et la raréfaction de l’eau risquent de raviver les conflits entre agriculteurs et éleveurs, récurrents lors des périodes de sécheresse.
Les organisations pastorales mauritaniennes appellent à une médiation rapide entre Bamako et Nouakchott pour rouvrir les frontières et garantir la mobilité du bétail. Elles lancent également un appel aux partenaires techniques et financiers pour accompagner un projet de développement de culture fourragère et d’alimentation en eau dans les régions de l’est et du sud-est.
Bamako accuse Nouakchott de soutenir les groupes terroristes qui opèrent sur son territoire
Les autorités mauritaniennes auront fort à faire pour convaincre Bamako de revenir sur sa décision en ce moment où le Groupe de soutien à l’islam et aux musulmans (JNIM), affilié à Al-Qaïda, mène la vie dure aux Maliens en ciblant les camions-citerne qui approvisionnent le pays en carburant. La junte militaire malienne accuse d’ailleurs le pouvoir mauritanien de laisser circuler sur son sol des groupes armés terroristes opérant dans le centre et le nord du Mali. Elle lui reproche aussi de fournir, directement ou indirectement, une assistance logistique et médicale à certaines bandes criminelles. Pour le gouvernement malien, la fermeture de la frontière constitue un moyen de faire pression sur Nouakchott afin qu’elle cesse tout soutien présumé aux terroristes.



